MOOG Robert

Îlots: Bonjour! (également relié à l'ilot Utopie)
Glossaire: Musique électronique, Nouvelle lutherie

Les musiciens n’ont pas toujours entretenu des relations très cordiales avec les instruments électroniques. Beaucoup d’entre eux y ont vu longtemps une concurrence sérieuse qui risquait à terme de les remplacer. Les compositeurs eux-mêmes étaient partagés entre ceux qui y voyaient un moyen d’élargir leur palette sonore ou leur approche du jeu, et ceux qui n’y voyaient qu’un gadget, tout juste bon à bricoler des jingles ineptes pour la radio et les centres commerciaux. Robert Moog a débuté sa carrière comme constructeur et vendeur de theremins, proposant une version modernisée, à transistors, de l’instrument original de l’inventeur russe Léon Theremin. Il a développé ensuite la série de synthétiseurs qui porte son nom, sans grand succès au début, jusqu’à ce qu’il ait l’idée d’ajouter un clavier à son instrument. Les synthétiseurs de cette époque était dépourvus de clavier et demandaient pour fonctionner un opérateur ayant des notions d’électronique, plus qu’un instrumentiste au sens traditionnel. Les musiciens refusaient généralement de se transformer en laborantins et de remplacer leur technique musicale par ce qu’ils considéraient comme un effet sonore, à peine un bruitage, indigne d’eux.

Ce n’est que lorsque quelques musiciens – notamment Walter Carlos sur son album Switched-On Bach, ou Jean-Jacques Perrey, véritable « démonstrateur » de l’appareil – prouvèrent qu’il était possible de réellement « jouer » du synthétiseur, en interprétant des pièces du répertoire classique, que l’intérêt pour lui dépassa le milieu de l’avant-garde. C’est par ce léger retour en arrière, vers un répertoire conventionnel basé sur la virtuosité du claviériste, que l’instrumentation électronique put se répandre et ainsi se démocratiser, ouvrant par la suite la voie à ceux qui allaient l’utiliser pour sa valeur réelle, comme l’outil créatif qu’elle est, et non comme une vague tentative d’imiter d’autres instruments. Il fallut attendre pour cela que le public s’accoutume à son tour à ces nouveaux sons pour que l’instrument conçu par Robert Moog connaisse enfin le succès qu’il méritait.

Le film de Hans Fjellestad retrace la carrière de l’inventeur à travers le regard de quelques musiciens qui utilisent un des nombreux claviers de la gamme Moog, et montre la relation étonnante entre ce génie de l’électronique et les artistes qui ont, comme lui, une relation quasi spirituelle avec leurs instruments. (Benoit Deuxant)

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MOOG, Robert