GREENAWAY Peter

Îlots: Bonjour!

Ce qui frappe d’emblée avec ces quatre films de Peter Greenaway, c’est cette volonté de présenter des formes musicales originales et propres à la culture américaine. John Cage, Philip Glass, Meredith Monk et Robert Ashley sont en effet des acteurs majeurs de genres nés aux États-Unis durant la seconde moitié du XXe siècle : musique expérimentale, minimalisme, opéra télévisé… Leur travail a symbolisé une émancipation face aux traditions du Vieux Continent et contribué à opérer un glissement du centre névralgique de l’avant-garde mondiale.

C’est pourtant un Britannique, le cinéaste Peter Greenaway, qui a entrepris la tâche d’exprimer par des moyens cinématographiques les particularités de ces courants. Si ses propres réalisations de fiction pêchent parfois par un esthétisme qui peut paraître poussif, Greenaway a privilégié ici une approche sobre, au service de son sujet.

C’est ainsi que la caméra envisage Glass et son ensemble en alternant plongées et contre-plongées. Un gros plan au ralenti sur Glass baissant la tête pour signaler le début de l’exécution donne le ton d’une mise scène délicate, presque en retrait. Pour Glass comme pour les autres musiciens, les images de concerts alternent avec des extraits d’interviews, mais c’est rarement dans ce discours que l’essence de la musique se dévoile le plus.

La mise en scène se fait plus inventive pour aborder l’opéra télévisé de Robert Ashley. En s’inspirant de Perfect Lives de ce dernier, des panneaux portant des mots énoncés lors des interviews entrecoupent la prestation scénique, tandis que les lieux d’entretiens sont encadrés par des écrans de télévision. L’importance de la télévision que l’on constate dans les œuvres d’Ashley trouve donc son écho dans le documentaire de Greenaway.

Le film le plus réussi est sans aucun doute celui consacré à John Cage. En un peu moins d’une heure, la plupart des thèmes chers à ce dernier, le silence par exemple, sont envisagés grâce à la captation d’images d’une série de concerts donnés (parfois en même temps) dans une église désaffectée aménagée à l’occasion des soixante-dix ans du compositeur. Au début du film, on assiste à des travaux de destruction dans ce lieu et c’est une des plus belles images que l’on puisse imaginer pour illustrer l’apport du musicien révolutionnaire. La présentation de sa musique se fait ludique, surtout grâce à l’humour de Cage. En ce sens, il s’agit d’une porte d’entrée idéale à l’univers protéiforme du compositeur. (Alexandre Galand)

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GREENAWAY, Peter